chapitre 1 : Enfance et Pré-Poudlard, 1969-1979

« -Je vois… je vois… »

La tête couverte d’un foulard carmin noué grossièrement en un turban, un jeune garçon agite ses mains autour d’une boule de cristal. Devant lui, un garçon encore plus jeune observe avec le plus grand intérêt les gestes étudiés de celui qui marmonne.

« - Je vois une forme, une forme humaine qui se déplace droit vers… »

Ivan Nikitine s’immobilise, plantant ses yeux noirs dans ceux de son petit frère. La mine grave et sévère il s’exclame : « - Vers le placard à bonbons la nuit pour chaparder des chocogrenouilles ! »
Borya rougit. Ce n’est pas le futur que son grand frère vient de lui prédire mais son passé. D’ailleurs il se souvient que les talents d’Ivan ne peuvent pas lui faire savoir de telles choses. Comprenant peu à peu la supercherie le jeune garçon prit en faute s’offense.
«  - C’est pas drôle ! Et comment tu sais d’abord ! » Ivan part d’un grand rire, il retire sa coiffe improvisée puis se lève. «  - Je n’en étais pas sûr ! Mais quand tata va savoir ça ! » Enjambant les coussins éparses pour prendre la fuite vers la cuisine Ivan s’époumone d’un « - Tataaaaaa !! » pour faire rager son frère coupable. Borya court après lui, Ivan rit aux éclats.

Le don de voyance d’Ivan fut révélé très tôt par une prédiction qui prit l’allure d’un cauchemar éveillé. Il y avait des générations que cela ne s’était produit. Et même si la famille Nikitine comptait d’illustres voyants comme Avgousta la diseuse de bonne aventure, rien ne laissait présager que ce don endormi se réveillerait subitement chez un membre de cette génération.
À l’âge de 7 ans, Ivan avait vu la mort de ses parents. Réveillé par la puissance des images il était allé se lover dans les bras de sa tante en pleurant. Sa tante qui gardait alors les deux frères en l’absence du couple Nikitine était loin de s’imaginer la gravité de la situation. Elle ne comprenait pas l’hystérie qui ébranlait cet enfant d’ordinaire si calme et tranquille. Un cauchemar, ça peut arriver à tout le monde, non ? D’ailleurs Ivan lui même ne pouvait expliquer exactement ce qui l’avait tant terrorisé. Des images, des sentiments, des pressentiments. La silhouette étendue de son père, une forte appréhension, sa mère, une odeur, un crâne vomissant un serpent. Volodya et Ustinya Nikitine quittèrent ce monde assassinés brutalement alors qu'ils prenaient la fuite.

C’est sous l’égide de leur tante aimante que nos deux frères trouvèrent refuge. Ils s’installèrent tout trois à Bristol dans la vieille demeure familiale dotée d’un grand jardin sauvage aux massifs foisonnants et aux nombreuses plantes grimpantes. Malgré un deuil à faire trop tôt, les garçons coulèrent des jours heureux dans ce petit cocon propice à la rêverie. Après une première prédiction cauchemardesque, Ivan fut envahi de nombreuses autres visions. Cela se produisait la plupart du temps le soir venu lorsque, réceptif au monde des songes, Ivan s’endormait. Toujours dans un futur proche, ses prédictions allait du bol de lait renversé au voisin qui se soulageait contre le tronc du séquoia centenaire du jardin. II n’y avait plus de doutes à avoir quant au don de double vue révélé du jeune garçon. L’heure était venue de déterrer un pan d’histoire familiale.
L’impressionnante malle poussiéreuse du grenier fut ouverte à nouveau après plus d’un siècle de repos. S’y trouvait tout un tas d’accessoires anciens, héritage précieusement conservé pour le prochain oiseau de mauvaise augure de la famille. Boules de cristal, runes, tarots et oracles abimés par l’usage, baguettes et parchemins en pagaille. Il y avait même un journal indéchiffrable, vielle relique en lambeau de notre fameuse Avgousta. Ce nécéssaire complet du parfait voyant était un véritable trésor pour Ivan et son frère. Fouiller dans cette malle était un voyage fabuleux dans un passé curieux.  

chapitre 2 : 1979-1986, Poudlard

La cérémonie de répartition à Poudlard se déroula sans le surprendre, un rêve la veille lui avait montré les couleurs de sa future maison. Le vieux choixpeau l’envoya à Serdaigle. Ivan était un élève de bonne volonté voir même parfois très bon lorsqu'il s'en donnait les moyens. Le rythme régulier de ses visions s’atténua peu à peu après son intégration à l’école des sorciers. Ses deux premières années passèrent sans qu’il ne s’attarde à developper son don. Il y avait déjà tant de choses à assimiler. Ses efforts pour exceller en sortilèges et métamorphose occupaient bien assez son esprit sans qu’il ne s’accable d’insomnies. Prédire l’avenir lui massacrait généralement ses nuits.

Ivan entama une troisième année qui signa le début de véritables cours de divination. Ne serait-ce que pour redorer le blason des Nikitine, notre jeune sorcier s’escrima plus qu’il ne l’aurait cru à se montrer exemplaire. Ses interprétations en lecture de feuilles de thé laissaient à désirer mais il excellait comme aucun autre de sa classe lorsqu’il s’agissait de déchiffrer les formes laiteuses d’une boule de cristal. Ses rêves prémonitoires reprirent subitement cette année là.

BUSE en poche avec brio direction ASPIC !

C’est lors de sa dernière année au château, occupé à la préparation des examens que notre sorcier tissa le lien le plus étroit de son adolescence avec une certaine Soledad Fraga. Une jeune Serdaigle née-moldue d'un an sa cadette. Surnommé affectueusement « Vanioush » par cette dernière, Ivan se sentait flotter pour la première fois sur un nuage. Les révisions interminables à la bibliothèque prenaient des allures de prétexte à les réunir. Vanioush et Soledad, Soledad et Vanioush, ces deux inséparables finirent par ne plus jamais se quitter. À la fin de leurs études, ils se firent la promesse candide d'un amour éternel et sans failles.

chapitre 3 : L'après Poudlard

Alors qu’on célèbrait la fin des examens à grand renfort de bièraubeurres au chaudronbaveur, Vanioush reçut une réponse favorable à sa candidature pour l’université des arts divinatoire de Paris. Hautement réputée pour sa formation des voyants du monde, il entama alors 7 années d’études supérieures en section étrangement intitulée « Je savais que t’allais dire ça ».
La vie à Paris est agréable, la beauté de cette ville terriblement moldue n’est pas pour lui déplaire et Soledad est là pour le familiariser à cet univers étranger lorsqu'ils se mêlent incognito à la vie citadine. Ils vivent ensemble dans un cocon d’amoureux sous les combles d’une vieille bâtisse. Cette époque est heureuse et tout semble si simple. Mais la fin des études approche, une année sabbatique lui est proposé pour perfectionner son déchiffrage des entrailles de golomiankas. Soledad retourne au Royaume-Uni alors que Vanioush part, boule de cristal dans le sac pour les forets de Sibérie.
Les trop nombreux jours passés en ermite à se peler les miches dans une cabane près du lac Baïkal trancha clairement avec le tumulte de la vie parisienne. Vanioush se morfondait de revoir Soledad, ouvrir le ventre de malheureux poissons pour y lire l'avenir était la pire décision de sa vie. C'est alors qu'une lettre terrible lui parvint. On annonçait le retour du seigneur des ténèbres.

chapitre 4 : Retour chez les British et drama time

Les sang-mêlés ainsi que nés-moldus n'étaient plus en sécurité depuis bien longtemps en angleterre. Soledad en était bien consciente. Cependant, Vanioush fraichement de retour au Royaume-Uni ne semblait pas encore en mesurer l’ampleur. Il était fort prétentieux de sa part de s’imaginer intouchable, mais que voulez vous, un jeune homme de son âge, sûr de lui et de ses capacités ne pouvait imaginer les risques qu’ils encouraient tous. Cette réalité rocambolesque où le mal pouvait surgir n’importe quand pour vous botter le cul ne semblait pas le concerner.
Pourtant, Soledad, sa chère et tendre moitié, ne l’entendait pas de cette oreille. Elle se sentait l'âme de protéger les sien et retourna un temps auprès de sa famille alors même que nos deux jeunes amoureux avaient comme projet de s’installer dans un petit appartement coquet de Londres.

Vanioush célèbre tristement ses 27 ans avec sa tante et son petit frère. Soledad ne répond plus à ses hiboux. Son dernier message lui ordonnait de ne plus chercher à la contacter, et de ne surtout pas lui rendre visite. Fallait-il vraiment qu’ils se fâchent ?  Pourquoi couper les ponts si brutalement ? Pas un mot pour son anniversaire ? Qu’avait-il fait de si mal ? Le soir, alors qu’il se couche, Vanioush reçoit une vision terrible. Une vision qui lui rappelle sa toute première. Des images, des sentiments, une appréhension, une odeur. Un flash et un cri terrifiant.

Plein d'horreur et ignorant les mots de Soledad quant à ne pas venir la retrouver, Vanioush n'y tient plus et se lève immédiatement de son lit pour emprunter le portoloin qui menait à la petite maison de campagne de la famille Fraga. Un sort d'anti-transplanage avait été lancé sur la propriété. Ne pas venir ? Il avait vu ! Il ne pouvait plus ignorer ces images !
Mais ce moyen de transport est si lent ! Si lent ! Arrivera t-il à temps ? Il était certain qu'elle lui en voulait. Elle lui en voulait de ne pas avoir pris les affaires du monde des sorciers en considération. Elle lui en voulait d'être resté passif. De ne pas l'avoir soutenue, suivie, épaulée alors qu'elle craignait le pire pour les siens. Soledad n'avait pas le droit de mourrir !

Arrivé à la porte de la petite maison des Fraga qui lui était si familière, Vanioush sentait que quelque chose clochait. Quelque chose d'inhabituel planait, quelque chose de terrible s'était passé. Ses craintes étaient confirmées. Une intuition morbide. Pas de lumière chaleureuse perceptible à travers la fenêtre. Pas de rires, ni d'effusions de voix. Un silence de mort. Il frappa non sans hésitations. Un étrange sentiment lui serrait la gorge. Pas de réponse. Bon sang ! Il se risqua à ouvrir la porte. Et c'est là que le drame se produisit.

Un sortilège le frappa en plein visage et ce fut le black-out après un cri déchirant dans la nuit. Lorsqu'il reprit connaissance il était dans le noir. Une douleur aiguë lui claquait dans le crâne. Où était-il ? Et cette douleur ! Ses souvenirs étaient confus, il tâtonna alentour et fut pris d'effroi.

Vanioush Nikitine avait perdu la vue. La petite maison de campagne était protégée d'un sortilège puissant contre les intrusions. La famille Fraga avait déserté les lieux sans préavis sous la menace mangemort (non sans donner du fil à retordre aux indésirables gêneurs à venir). Loin de se douter que le misérable gêneur qui viendrait le premier sur les lieux ne serait pas un ennemi. Envoyer des hiboux en cette période néfaste était hautement dangereux. Et il était en cela très compliqué de prévenir qui que ce soit. Soledad s'en mordrait les doigts pour le restant de ses jours. Tout allait bien pour la famille Fraga. Ils avaient trouvé refuge chez une grande tante, dans les steppes.

Lorsque la bataille épique menée à Poudlard prit fin en 1998 se soldant par la mort du Lord et du jeune Harry Potter, Vanioush Nikitine était toujours en convalescence. Le verdict venait de tomber, il ne retrouverait pas la vue et allait devoir réinventer sa manière de vivre en adaptant ses perspectives d'avenir.

Trois ans plus tard, après une longue rééducation fastidieuse, Vanioush est sur pied et plus motivé que jamais à se refaire une place dans la communauté sorcière. Fort d'une envie de s'émanciper il offre aujourd'hui ses services dans le domaine qu'il maîtrise le mieux... Les prédictions amoureuses.

La famille Nikitine est une famille de sang mêlé aux racines slaves. Leur plus illustre ancêtre n'est autre qu'Avgousta Baiko, diseuse de bonne aventure réputée pour ses prédictions matrimoniales toujours exactes. D'après la légende entretenue par les descendants d'Avgousta, il se dit que le Tsar Fedor III lui même aurait infligé 40 coups de Knout à la pauvre voyante après ce qui fut sa dernière prédiction. La leçon à retenir est qu'aussi talentueux soit-on, prédire qu'un Tsar mourra trois mois après son second mariage est un sacré risque à prendre...

Aujourd'hui la famille d'Ivan ne se résume qu'à trois membres. Une tante paternelle aimante, douée de ses mains et généreuse. Un petit frère taciturne et renfermé à l'allure malingre et enfin, Ivan lui même.
Notre voyant non-voyant entretien des relations plutôt chaleureuses et étroites avec sa tante et son frère. Plus on est de fous plus on rit dit-on parfois ? Nos trois Nikitine ne sont pas en reste et leur minorité numérique profita même à ce qu'ils resserrent les liens déjà solidement noués. Il n'est pas rare d'entendre des éclats de rire le soir venu lorsque tous se retrouvent autour d'une table toujours prête à la même heure. Tata Tanioushka régit le foyer Nikitine comme un cocon d'amour. Elle couve ses neveux comme une mère ses fils et les frères Nikitine le lui rendent bien.

Derrière cette masse de cheveux sombre se cache une personnalité sensible. Doté d'une capacité d'analyse pointue, notre sorcier fait partie de la catégorie des personnes réceptives. À l'écoute, calme et loin d'être exubérant, il donne généralement comme première impression de ne pas juger son prochain.
Pourtant cela serait se tromper gravement sur son compte. Aussi perspicace soit-il, Ivan juge. Il juge même à outrance. En quête d'idéal constant, il n'accepte pas les fautes et autres petites bourdes qui massacrent les règles de bienséance. Lui mentir une fois est un aller simple pour la case oubli. Cette exigence de justice et loyauté peut sembler extrême et c'est bien pour cela que les amis de notre sorcier se comptent sur les doigts d'une main.
Cependant, s'il attend énormément de ses proches, il n'en exige pas moins de lui même.
Vouloir faire partie de l'entourage d'Ivan n'est pas une mince affaire. Mais l'être n'en est pas moins compliqué. Quand Ivan en vient à vous aimer, c'est pour la vie. Fidèle et présent au moindre problème, il ne compte pas les heures passées avec l'être aimé. Dévoué il peut facilement faire des plans sur la comète sans qu'on s'y attende. Sa dépendance affective peut se muer rapidement en forte jalousie.
Dans ses phases les plus sombres, ses visions l'assaillent d'idées noires et on pourrait le penser à la limite du burn out. Son goût pour les alcools forts le rassérène parfois. En bon mélomane qui se respecte Ivan se calme aussi par le biais de la musique, profitant de ses instants de solitude pour pratiquer divers instruments à cordes.

Notre sorcier arbore un physique gracile et androgyne. Il ne tient que très peu de son père qui quant à lui était robuste et de taille moyenne. Souvent moqué pour son aspect élancé et sensuel, Ivan ne s'accepte pas comme il le devrait. Il tient en horreur son apparente maigreur, sa bouche aux lèvres charnues, ses sourcils fins et la forme ovale de son visage. Tournant le dos aux appareils photos, préférant négliger les souvenirs. Nikitine tient de sa mère, une femme magnifique. Plus jeune, nombreux étaient ceux qui le prenaient pour une fille, ses cheveux sombres épais et toujours portés longs n'arrangeait rien. Il cache son profil féminin derrière ses longues mèches noires.
L'expression de son visage est souvent difficile à cerner. Ses yeux autrefois bruns ténèbres sont maintenant recouverts d'un voile terne et opaque. Grand de taille, sa stature est droite et élégante. 
En ce qui concerne ses vêtements, Ivan Nikitine reste simple avec un attrait particulier pour les bijoux. Un anneau à l'oreille, des colliers de pierres semi-précieuses ainsi que des bagues de turquoises offerts par sa mère lorsque cette dernière était vivante, couvrent son cou et ses longs doits de musicien.
Toujours accompagné de sa fidèle Grishka, une grande chienne-louve tchécoslovaque, Ivan ne passe pas inaperçu dans les rues du chemin de traverse, sa longue canne blanche frappe le sol en un rythme régulier qui prévient toujours les passants de son arrivée.
Sa voix est grave et profonde, et lorsqu'il lui arrive d'esquisser un sourire de petites ridules marquent l'expression de son visage paisible.

S'il s'était écouté Vanioush Nikitine aurait pu prédire son propre destin funeste et ainsi peut-être l'éviter. Mettre son don à contribution des coeurs brisés/paumés n'était pas la première ambition de notre sorcier. Pourtant l'agence excentrique "Adopte un Sorcier" qui partait d'une plaisanterie entre copains autour d'une bièreaubeurre voit le jour à la grande surprise de tous. La clientèle se fait d'abord timide, mais quelques mois suffisent par un bouche à oreille sceptique à rendre la boutique connue des sorciers passant au chemin de traverse...