Ses lèvres s’animèrent toutes seules, mues par une force incontrôlable, et l’écho de sa voix se fit entendre, imperturbable, tandis qu’elle débitait tout ce qu’elle avait appris de lui dans les grandes lignes. La sensation, qu'elle avait déjà connue par le passé lors des entraînements de la formation d'Auror, n'en était pas moins particulièrement désagréable - impossible de s'y habituer totalement.

« Vous êtes Aedan Bridewell. Vous avez trente-cinq ans, vous êtes un sang-mêlé et vous êtes né en Irlande. Vous êtes célibataire et sans enfant, et vous êtes actuellement professeur de Défense contre les Forces du Mal à Poudlard. Vous dirigez également la formation des Black Swan. Votre casier judiciaire est vierge et c’est très sûrement la première fois que vous avez la visite d’un Auror dans votre bureau. » Un sourire pouvait presque s’entendre dans sa voix, mais l’effet de la potion était tel qu’une expression véritablement figée dans le marbre avait pris le pas sur toutes les autres émotions. Tara faisait volontairement en sorte de ne pas lutter contre le Véritasérum pour laisser un maximum de clairvoyance et de transparence dans les réponses qu’elle donnait à l’enseignant. Elle aurait pu essayer de tricher ou user d’un sort, d’un antidote quelconque, mais la malchance et l’absence de talent d’Occlumens l’empêchaient de maîtriser la situation. Et de toute manière, c’était ce qu’il voulait ; qu’elle soit honnête, par quelque moyen que ce fut. Sa gorge la tira un peu, comme pour la forcer à ne pas s’arrêter en si bon chemin. « Et j’oubliais … vous êtes le leader de la Résistance. J’ai eu du mal à m’en assurer, mais le mois que j’ai passé à retracer vos faits et gestes a payé apparemment. »  Elle ne voulait pas évoquer le reste – la seule chose qu’elle avait vue sans voir, ce dossier un peu trop épais pour ne pas cacher quelque chose. Tara ne l’avait pas lu, en conséquence elle ignorait tout de cette chose qui le concernait, et intérieurement son intuition lui murmurait que ce n’était pas plus mal.

« C’est tout ce que je sais de vous. Pas trop déçu ? »  L’ironie n’était pas forcément la meilleure alliée dans un tel contexte, mais quitte à passer un moment aussi compliqué, autant chercher à le rendre moins pénible. Alors qu'elle aurait du attendre sagement que son interlocuteur poursuive ses questions, l'habitude sûrement indécrottable de toujours mener les interrogatoires la reprit et davantage par réflexe que par besoin de le contrarier, Tara laissa sa curiosité, poussée par le Véritaserum, parler à sa place. « Qu'est-ce qui vous a fait vous décider à créer un tel mouvement, au juste ? »